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Eté 1944, entre enthousiasme, douleur & espérance

7ème partie : Quelques lignes au sujet de Bir Hakeïm (photo : stèle Douch)

par Jacques Chamayou


 

 

A Mourèze l’accueil des britanniques n’est pas aussi chaleureux qu’à Fraïsse. Rouan, alias « Montaigne » le chef, est un ancien des brigades internationales ayant combattu en Espagne. La rencontre entre les deux hommes est distante. Croft en apprendra plus tard les raisons… Bir Hakeïm a une longue histoire, jalonnée de moments tragiques, que nous nous contenterons de résumer ici. Bon nombre de récits et d’analyses lui ont été consacrés pour que nous nous y penchions davantage.

 

… Ce maquis voit le jour dès l’été 42, autour de Villefranche-de-Rouergue. Il prend le nom de la célèbre bataille qui s’est déroulée en Lybie en mai-juin 42. Au cours de celle-ci, la 1ère brigade française libre, commandée pat le général Koenig, mit à mal l’avancée de l’Afrika Korps de Rommel, qui se dirigeait vers Le Caire. Les anglais étaient en pleine préparation d’un front qui devait rejoindre la méditerranée à Tobrouk. Ils y parvinrent grâce au retard et aux pertes que leur infligea une armée hétéroclite constituée de 3700 hommes regroupés sous l’emblème de la croix de Lorraine… Des militaires chevronnés, des soldats de l’Afrique Noire, mais aussi des jeunes volontaires qui avaient suivi la voix de Londres dès l’armistice signée par Pétain.

 

En 43 par conséquent, les hommes affluent autour du commandant « Barot » qui dirige le maquis implanté dans le Bas-Rouergue. Dès le départ le maquis prend le nom de Bir Hakeïm ; jean Capel alias « Barot » décide de se déplacer vers l’est pour tenter de trouver une base plus adaptée. D’étape en étape il parvient jusqu’à Douch sur la façade nord du massif du Caroux. Dénoncés, les hommes de « Barot » et des frères de Roquemaurel sont assaillis par une colonne ennemie montée depuis Bédarieux, par une matinée noyée de brume. La surprise fut totale. Le rapport de force fortement déséquilibré. La majorité des maquisards réussit à s’enfuir grâce au sacrifice de quelques uns de leurs camarades. Une stèle commémore tout près de l’église cette première tragédie. La visite du lieu reste un moment intense et n’est pas s’en rappeler les émotions qui traversent les visiteurs devant la stèle de Fontjun. Car si par la suite, « Bir Hakeïm » va connaître de nombreuses péripéties dans le nord du Gard notamment, son destin sera jalonné, hélas de douloureuses pertes. Bien que sous la tutelle de l’Armée Secrète, « Barot » et son groupe vont parfois prendre des orientations qui ne feront pas l’unanimité au sein des cadres de la Résistance. Or, les faits d’armes sèment également le doute auprès des autorités militaires nazies implantées à l’est du Languedoc. Et puis les maquisards de « Bir Hakeïm » sont des hommes intrépides. Nouvellement implantées dans les Cévennes ils prennent une large part à la bataille de la Vallée Française, dans un quadrilatère qui ferme les communes de Saint-Germain-de-Calberte, Saint-Martin-de-Lansuscle, Sainte-Croix-Vallée-Française et Saint-Etienne-Vallée-Française. A cette occasion et pour quelques mois encore, « Barot » est associé à un groupe d’anti-fascistes allemands présents en Lozère depuis 42. On ne précisera jamais assez combien furent nombreux les allemands communistes, juifs, démocrates, poursuivis par le régime nazi, qui trouvèrent refuge en France dès le milieu des années trente… et qui pour une très large majorité prirent une part active à la lutte armée au sein de la résistance française. Dans la région, la figure de proue se nommait Otto Kühne. C’est lui qui libéra Nîmes en août 44, à la tête de deux mille hommes issus des Franc Tireurs Partisans Main d’œuvre Immigrée (FTPMOI). Mais l’association Barot-Kühne va cesser avec la tragédie de la Parade sur la Causse noir. Le maquis « Bir-Hakeïm » est surpris au petit jour dans ce hameau. Une grande partie des hommes va être tuée. Parmi eux des guérilleros espagnols, ralliés récemment. Barot tombe héroïquement. Seuls quelques très rares rescapés pourront témoigner. Une vingtaine de prisonniers seront torturés de manière on ne peut plus cruelle avant d’être fusillés dans le ravin de Badaroux, près de Mende… Peu de temps avant l’arrivée de Croft à Mourèze, le commandant Demarne avait réussi dans la difficulté à reconstituer les forces du groupe Bir Hakeïm. Mais il est tué lors d’une escarmouche, au cours d’une opération de parachutage le 4 août, près de Gignac. Son adjoint, le capitaine Rouan, l’avait alors remplacé. Quelques jours seulement avant l’arrivée d’Andrew Croft…

… Quand il apprend les détails de l’histoire de « Bir Hakeïm », Croft comprend l’attitude de Rouan alias « Montaigne ». Il n’en est que davantage enclin à collaborer avec ce dernier pour mener à bien la mission que Londres lui a confiée. Mission qui va s’avérer compliquée mais qui sera couronnée de succès. Les colonnes allemandes, harcelées au possible, vont subir de très lourdes pertes au nord de Montpellier. Ce qui aura pour effet direct la libération de la préfecture du département. Une ombre au tableau dans le cœur de Croft. Son fidèle adjoint, le capitaine Peter Fowler, est tué avec deux gendarmes par une compagnie de SS, alors que le trio est en reconnaissance sur un side-car près du village de Fontès.

A suivre ….