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Sur la piste de nos ancêtres, les Néolithiques, 1ère partie

par Philippe Barjaud


 

« Nos ancêtres les Gaulois… », c’est ce que j’avais appris autrefois à l’école. En fait, une filiation quasi mythique, construite lors de l’élaboration du « roman national » pendant le Second Empire (1852-1870), et reprise en chœur sous la Troisième république…

 

Mais au fait, qui sont nos « vrais » ancêtres ? Je veux parler des plus anciens habitants de Capestang…  Qui sont-ils, les premiers à avoir vécu et cultivé sur cette terre, pêché dans cet étang, fait pâturer leur bétail dans ces garrigues… ?  

 

 Je me lance donc sur leur piste, en commençant par la consultation du site Internet de la commune : « La région de Capestang a été occupée depuis le paléolithique, villas romaines, voie Domitienne, tombes wisigothiques ». Paléolithique (autrefois, on disait « âge de la pierre taillée »), allons voir ce qu’en dit la littérature.

 

J’y apprends que les premières traces d’un établissement humain remontent au Paléolithique inférieur (entre 200.000 et 100.000 ans avant notre ère), et se trouvent entre les campagnes d’Aureilhe et de Longuet, sur un plateau caillouteux préservé de l’érosion. Là, au milieu des vignes labourées, on aurait ramassé des exemplaires du premier outil de l’humanité, des « choppers », c’est-à-dire des galets sommairement taillés, le « couteau suisse » de l’époque. Notre ancêtre s’appelle « Homo neandertalensis » ou Homme de Néandertal. Il vient de prendre la succession de « Homo erectus », au sens propre « l’homme redressé ». Ce cousin éloigné nous ressemble déjà beaucoup, en plus costaud (plus gros biceps, et plus gros cerveau !), mais assurément loin du sauvage poilu que décrivaient les illustrations d’antan.

 

Plus intéressant encore, de l’autre côté de l’étang, mais chez nos voisins de Poilhes, je tombe sur un site du Paléolithique supérieur, découvert en 1961 au pied de la butte d’Ensérune. Nous sommes autour de 20.000 ans avant notre ère, dans un campement en plein air de chasseurs aurignaciens, le plus important de toute l'Europe ! Les occupants ne sont plus Monsieur et Madame Néandertal, mais « Homo sapiens sapiens », quasiment nos frères et sœurs.

 

J’avance de nouveau dans le temps, pour arriver à une période située entre 3.500 et 2.000 ans avant notre ère. Cette fois-ci, les habitants de la région ne sont plus des « chasseurs-cueilleurs » du Paléolithique. Ils sont arrivés à l’étape suivante de l’évolution, celle des pasteurs et des premiers agriculteurs, que l’on nomme le Néolithique (autrefois, « âge de la pierre polie »). De nouveaux indices apparaissent, çà et là. Entre les domaines de Guéry et de la Grangette, l’abbé Joseph Giry, le créateur du musée archéologique de l'oppidum d’Ensérune, aurait décelé des fonds de cabanes… le premier bourg de « Capestang » ? Des traces d’occupation sont également trouvées à la limite de Puisserguier, à Malemort, et de Montady, à Saint-Pierre.

 

Mais bien souvent, dans un terroir de culture intensive comme celui de Capestang, les vestiges des civilisations anciennes ont disparu, tout simplement parce qu’on a continuellement défriché et retourné les terres, rebâti des fermes et des villages sur les ruines de ce qui les précédait. La notion de conservation du patrimoine est somme toute récente, elle ne date que du 19ème siècle, avec le romantisme. Alors, où trouverai-je une trace tangible de la présence de nos ancêtres néolithiques ?

 

Eh bien, pour cela, je dois aller un peu plus au nord, franchir la route de Quarante à Creissan, et grimper dans la garrigue. Au bout d’une piste embroussaillée, au milieu des chênes kermès et du romarin, je découvre enfin une sorte de fosse rectangulaire, entourée de pierres dressées. Là, il y a plus d’un siècle, les fouilles ont mis au jour une sépulture collective ayant contenu plus d’une trentaine de corps. C’est tout ce qui reste du dolmen d’origine, analogue, en bien moindre proportion, à celui, fameux, des Fades de Pépieux, ou encore les Allées Saint-Eugène à Laure-Minervois.

 

Ce cimetière est magnifiquement placé. La vue porte loin, vers la Clape, les Corbières, le Canigou. Nos anciens voulaient que leurs défunts, après avoir bien vécu et cultivé sur cette terre, pêché dans cet étang, fait pâturer leur bétail dans ces garrigues, aient pour se reposer la meilleure place sur Terre.

 

Voilà… Je redescends maintenant dans le monde des vivants, de mes contemporains.

 

En attendant de reprendre la piste…